‘L’orthodoxie juive peut être moderne et inclusive’

“Les tenants du Judaïsme ultra-orthodoxe accentuent les divisions au sein du peuple juif avec leur attitude exclusionniste. Les Juifs ultra-orthodoxes adoptent un comportement dédaigneux à l’égard des Juifs conservateurs, réformistes ou reconstructionnistes. C’est regrettable! À notre époque, le Judaïsme a, plus que jamais, besoin d’unité et non de divisions.”

“Les tenants du Judaïsme ultra-orthodoxe accentuent les divisions au sein du peuple juif avec leur attitude exclusionniste. Les Juifs ultra-orthodoxes adoptent un comportement dédaigneux à l’égard des Juifs conservateurs, réformistes ou reconstructionnistes. C’est regrettable! À notre époque, le Judaïsme a, plus que jamais, besoin d’unité et non de divisions.”

Ces réflexions percutantes sur l’état actuel Judaïsme n’ont pas été formulées par un farouche détracteur du courant ultra-orthodoxe juif, mais par un Rabbin orthodoxe, Yamin Levy.

Cet universitaire et éducateur, qui vit et enseigne à New York, n’y va pas par quatre chemins quand il émet son opinion sur l’éducation qui est dispensée dans le monde juif ultra-orthodoxe.

“Les Juifs fondamentalistes sont horrifiés par l’idée que leurs enfants étudient les mathématiques, les sciences, l’Histoire, les sciences humaines, la littérature… Ces matières profanes sont exécrées et complètement bannies dans le système d’éducation juif ultra-orthodoxe.”

Le Rabbin Yamin Levy déplore que les Sépharades, en Israël et dans la Diaspora juive, qui ont adhéré à des mouvements ultra-orthodoxes renient le riche héritage éducatif que Maïmonide -le Rambam- et d’autres illustres Maîtres du Judaïsme sépharade leur ont légué.

“Maïmonide, le plus brillant esprit que le Judaïsme ait connu, a été éduqué au contact direct avec les sciences, les mathématiques, la philosophie… Ce grand Maître ne cessait de répéter: “On ne peut pas aimer Dieu si on ne connaît pas les sciences”. Dans le monde sépharade, la tradition éducative a toujours tablé sur un excellent enseignement de la Torah et un excellent apprentissage des matières profanes. Être un Juif orthodoxe et poursuive des études universitaires en médecine, en ingénierie, en science, en littérature… ce n’est pas une incongruité. Pour les Juifs ultra-orthodoxes, “orthodoxie juive” et “étude des matières non toraniques” sont deux notions incompatibles, totalement antinomiques.”

Comment peut-on aujourd’hui éduquer un enfant juif sans qu’il ouvre un livre de mathématiques, de science ou d’Histoire?, lance, avec une pointe de désarroi, le Rabbin Yamin Levy.

“Nous, Juifs, avons urgemment besoin de revenir à notre vraie culture: une culture basée sur un Judaïsme authentique, ouvert et tolérant. Ce n’est pas pour rien qu’on nous appelle depuis des lustres le “Peuple du Livre”. Maintenir des enfants juifs dans la plus grande ignorance, c’est renier notre héritage culturel et éducatif, plusieurs fois millénaire.”

L’attitude “très misogyne”, selon le Rabbin Yamin Levy, adoptée par les Juifs ultra-orthodoxes à l’endroit des femmes le laisse aussi coi.

“Il y a aujourd’hui des endroits en Israël où les femmes juives ultra-orthodoxes ont le visage complètement couvert avec un foulard ou une écharpe. Je me dis alors: “Ça, ce n’est pas notre peuple! Nous avons perdu le contact avec qui nous sommes réellement”. Dans les Communautés juives ultra-orthodoxes, les questions relatives à la sexualité sont très tabous. Si un Juif orthodoxe serre la main à une femme, c’est considéré comme une hérésie, quasiment comme un crime de lèse-majesté. Pourtant, la Halakha nous dit que c’est “pire d’embarrasser un être humain, en l’occurrence une femme, que de lui serrer la main”. C’est la Halakha qui doit déterminer le comportement d’un Juif, non la crainte ou la superstition.”

Né dans une famille sépharade native de Tanger -Maroc-, le Rabbin Yamin Levy a passé sa jeunesse à Montréal. Diplômé de la Yéchiva University de New York, où il a obtenu son ordination comme Rabbin, il a mené une brillante carrière universitaire dans cette réputée institution académique américaine. De 2001 à 2006, il a été Directeur du Département des Études sépharades de la Yéchiva University. Spécialiste reconnu de l’oeuvre et de la pensée de Maïmonide, le Rabbin Yamin Levy est l’auteur de plusieurs livres remarqués, dont Confronting the loss of a Baby. A personal and Jewish perspective – “Confrontés à la perte d’un bébé. Une perspective personnelle et juive”- et d’un Manuel sur le deuil dans la tradition sépharade. Il a signé dans des revues universitaires des dizaines d’articles consacrés à la Halakha, aux études bibliques et à l’oeuvre de Maïmonide.

Il est actuellement vice-président de la Yéchiva Chovevei Torah (Y.C.T.). Établie à Manhattan, dans le Campus de l’Université Columbia, cette institution éducative orthodoxe, fondée en 1999 par le Rabbin activiste Avi Weiss pour endiguer l’influence auprès des jeunes Juifs de la mouvance orthodoxe de droite, forme des Rabbins dans l’esprit d’“une orthodoxie juive moderne, ouverte et inclusive”. Des Rabbins officiant aujourd’hui à Montréal sont des diplômés de ce Collège rabbinique: le Rabbin Adam Scheier de la Congrégation Shaar Hashomayim et le Rabbin Yonah Berman, assistant Rabbin et Directeur des Programmes éducatifs à la Congrégation Shaar Hashomayim.

Parallèlement à ses fonctions de dirigeant et d’enseignant à la Yéchiva Chovevei Torah, le Rabbin Yamin Levy a fondé en Israël, en 2003, un projet éducatif et social remarquable: le Centre de l’Héritage de Maïmonide de Tibériade. Ce Centre d’étude international spécialisé dans l’enseignement de la pensée de Maïmonide est localisé à proximité de la sépulture du Rambam. Cette tombe était dans un état d’abandon désolant avant que le Rabbin Levy et une poignée d’autres bénévoles ne nettoient et embellissent ce site en pleine décrépitude grâce à des fonds qu’ils ont recueillis aux États-Unis et au Canada.

Le Centre de l’Héritage de Maïmonide est aussi très actif sur le plan social à Tibériade: il prodigue de l’aide aux enfants défavorisés de cette ville de la Galilée durement touchée par la crise économique. La Fédération Sépharade du Canada, présidée par Moïse Amselem, parraine un important projet social initié il y a trois ans par ce Centre éducatif: servir gratuitement quotidiennement des petits déjeuners aux enfants nécessiteux dans les écoles de Tibériade.

Le Rabbin Yamin Levy exhorte tous les Juifs à se rapprocher les uns des autres, indépendamment de leur degré de pratique religieuse.

“Nous, Juifs, devons participer et contribuer au monde qui se construit chaque jour devant nos yeux. On ne peut pas se contenter de prendre ce que ce monde engendre de bénéfique et ignorer tout le reste. Peu importe nos obédiences religieuses, les Juifs doivent s’asseoir ensemble pour parler et mieux se connaître mutuellement. Nous partageons des valeurs communes: la Tsédaka, notre profond amour pour l’État d’Israël, l’étude de nos textes sacrés…”

Le rapprochement entre des Juifs  de diverses tendances religieuses est au coeur de la philosophie d’enseignement et d’action de la Yéchiva Chovevei Torah, rappelle-t-il. Cette institution éducative orthodoxe organise régulièrement des symposiums d’étude d’une journée auxquels sont conviés des étudiants en Études rabbiniques issus des mouvements conservateurs, réformistes et constructionnistes.

“Notre point commun est la réflexion et la discussion sur un texte de Torah. Même s’il existe des divergences de vues sur le plan religieux entre ces différentes mouvances du Judaïsme, le plus important est que nous arrivons a nous asseoir ensemble autour d’une table avec un esprit respectueux. Nous avons beaucoup à apprendre les uns des autres.”

D’après le Rabbin Yamin Levy, la tradition éducative sépharade est “un précieux legs” qui devrait être réhabilité et perpétué dans le monde juif.

“Les grands Chahamim -Sages- dans le monde médiéval sépharade, Maïmonide, Rabbi Yossef Caro… furent de remarquables Rabbins, érudits et éducateurs. Des Maîtres exceptionnels qui avaient une grande ouverture d’esprit. Le monde qui les entourait ne leur faisait pas peur. Au contraire, ils considéraient que le dialogue avec les Juifs qui ne partageaient pas leurs vues sur le Judaïsme et les non-Juifs était une nécessité impérieuse. Leur principal but était d’enseigner et transmettre et non de convaincre.”

In an interview, Rabbi Yamin Levy, vice-president of the Yechiva Chovevei Torah in New York, talks about the need for all branches of Judaism to have a general education and to get along with each other.

 

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