Une centaine de personnes -majoritairement des femmes-, issues de diverses Communautés culturelles, ont bravé la tempête de neige qui déferlait ce soir-là pour assister, à la Bibliothèque interculturelle de Côte-des-Neiges, à une table ronde qui avait pour thème: “L’engagement communautaire: frein ou tremplin à l’intégration?”
Quatre femmes québécoises, membres actives des Communauté, juive, autochtone, arabo-musulmane et russe, se distinguant par leurs parcours communautaire et professionnel, ont été les conférencières invitées de ce panel, animé par Stéphanie Kitembo, journaliste à Radio-Canada.
Cet événement, qui s’est déroulé sous la présidence d’honneur de Patricia Rimok, présidente du Conseil des relations interculturelles du Québec, a été organisé par le Comité des Femmes juives francophones (F.J.F.), avec le soutien du Ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles du Québec et en partenariat avec l’École des Affaires publiques et communautaires de l’Université Concordia.
Créé il y a trois ans sous l’égide de la Communauté sépharade unifiée du Québec, le Comité des Femmes juives francophones s’est donné comme objectif de favoriser le rapprochement intercommunautaire par la connaissance mutuelle tout en respectant la riche diversité culturelle qui caractérise la société québécoise.
“Comme citoyennes de ce pays, les Femmes juives francophones veulent contribuer à bâtir un avenir dans une société où diverses sensibilités coexistent harmonieusement”, a dit Gisèle Chetrit, présidente du Comité des Femmes juives francophones.
Dans son allocution, Patricia Rimok, présidente du Conseil des relations interculturelles du Québec, félicita ce regroupement de femmes juives francophones pour leur “excellente initiative qui contribuera, sans aucun doute, à favoriser le dialogue et le rapprochement entre les Communautés culturelles qui ont décidé de bâtir communément leur avenir au Québec”.
Pour Kathy Assayag, qui après avoir mené pendant plusieurs années une brillante carrière bancaire à la Deutsche Bank et dirigé la Campagne de l’Appel Juif Unifié de la FÉDÉRATION CJA assume actuellement les fonctions de vice-rectrice au soutien universitaire et aux relations avec les diplômés de l’Université Concordia et de présidente de la Fondation de cette institution académique montréalaise, l’engagement communautaire est certainement un tremplin pour s’intégrer socialement et professionnellement.
Née au Maroc dans une famille sépharade qui émigra au Canada en 1968, Kathy Assayag relata les principales étapes de son cheminement personnel.
“Ce qui peut paraître paradoxal, c’est que des immigrants, dont le souhait le plus cher est de s’intégrer dans leur nouvelle société d’accueil, cherchent d’abord à participer à une vie communautaire culturelle, dit-elle. Au cours des débats organisés par la Commission Bouchard-Taylor sur les pratiques d’Accommodements raisonnables au Québec, certains ont affirmé que l’appartenance communautaire était un frein à l’intégration sociale. Ainsi, on a utilisé les termes de “ghettoïsation”, “isolement”, “repliement sur soi”… On a même laissé entendre que l’appartenance communautaire empêcherait les nouveaux immigrants d’adhérer aux valeurs québécoises. Mon cheminement personnel prouve le contraire. Mon engagement communautaire a été essentiel à mon intégration dans la société québécoise et à mon épanouissement professionnel.”
D’après Kathy Assayag, l’engagement communautaire est un tremplin non seulement pour l’intégration sociale, mais il favorise aussi un meilleur bien-être physique et spirituel.
“Prendre comme point de départ sa Communauté culturelle, c’est fantastique! D’abord, on est naturellement plus à l’aise dans notre propre Communauté car celle-ci est une zone de confort. Ça nous donne plus de confiance en soi. Ensuite, il ne tient qu’à nous d’élargir notre cercle d’amis et de connaissances. L’engagement communautaire ne fait pas obstacle à l’intégration. Au contraire, c’est une rampe de lancement qui nous permet de prendre notre envol.”
Julie Rousseau est née dans la Communauté autochtone Inou du Lac-Saint-Jean. Elle dirige actuellement le Projet ISHKUTEU à l’Université du Québec à Montréal, qui prodigue de l’aide à des femmes autochtones victimes de violence conjugale.
Très impliquée dans sa Communauté d’origine, Julie Rousseau est aussi très active au sein de l’Association des étudiants autochtones et de l’Association des femmes autochtones du Québec. Son engagement communautaire à été un tremplin pour sa vie professionnelle, confia-t-elle.
“Les autochtones du Québec et du Canada sont toujours marginalisés. Les préjugés à leur endroit sont très tenaces. Parler de la réalité et des attentes de ma Communauté dans le cadre de mes activités professionnelles, c’est quelque chose qui est pour moi très important et gratifiant.”
Native du Maroc, Khadija Darid a émigré au Québec il y a vingt ans. Après avoir travaillé durant plusieurs années dans une Chambre de commerce et dans le milieu hospitalier, elle a fondé le magazine montréalais Femmes Arabes, dont elle est toujours l’éditrice.
Quand un immigrant arrive dans son pays d’accueil, il a l’impression qu’il a “une identité forte, assurée et assumée”. Mais, ajouta-t-elle, l’“immigration est un des facteurs de bouleversement de l’identité”.
“Émigrer, ça requiert un réaménagement identitaire. C’est comme une coupure d’electricité qui éteint subitement un ordinateur. Il faut le redémarrer!”
Pendant ses premières années au Québec, Khadija Darid sentait que son identité comme femme était sérieusement remise en cause car le statut de la femme dans la société québécoise n’est pas du tout le même qu’au Maroc.
“Au Québec, comme dans les autres pays occidentaux, le regard des autres sur une femme issue de la culture arabo-musulmane s’avère souvent une expérience assez douloureuse.”
Après les attentats du 11 septembere 2001, Khadija Darid a décidé de s’engager pleinement auprès de sa Communauté. Elle a fondé un magazine et une Association pour les femmes arabes.
“Mon parcours professionnel a été un atout et un tremplin pour me rapprocher de ma Communùauté d’origine. L’engagement communautaire, ce n’est pas facile. Ça demande beaucoup d’énergie et beaucoup de temps. Mais, c’est un tremplin qui peut aider des femmes des Communautés culturelles à aller en politique, à s’engager dans la vie sociale et à occuper des postes de responsabilité importants.”
Svetlana Lidvine est une ingénieure d’origine russe qui vit au Québec depuis treize ans. Elle est actuellement conseillère politique de la ministre des Communautés culturelles du Québec, Yolande James, qui lui a confié le Dossier de l’intégration des immigrants européens à la société québécoise.
Selon cette polyglotte, qui ne parlait pas le français quand elle est arrivée au Québec, pour un immigrant, l’engagement communautaire est sans doute “un grand tremplin” pour s’intégrer socialement et décrocher un emploi répondant à ses qualifications professionnelles.
“Le milieu communautaire est un milieu très enrichissant où l’on apprend beaucoup de choses et où on bâtit des réseaux de contacts, qui nous seront très utiles plus tard dans notre vie sociale et professionnelle.”
The Comité des Femmes juives francophones recently sponsored a panel of women from different cultures – Jewish, Arab, native Canadian and Russian/east European –who spoke about their immigrant experiences in Quebec.